L’équipe de promotion de la santé de MSF discute avec des femmes dans la salle d’attente de l’hôpital de Murnei, au Darfour Occidental. Soudan, 2025. © Belen Filgueira/MSF
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Soudan : fausses couches et accouchements compliqués pour les femmes enceintes au Darfour

La pénurie de soins de santé au Darfour met en danger les femmes enceintes

Avec seulement quelques installations de santé encore opérationnelles au Darfour, les femmes enceintes doivent faire des voyages éprouvants pour être soignées. L’insécurité, les postes de contrôle et les moyens de transport inabordables ou non disponibles les obligent à entreprendre de longues randonnées à pied ou sur le dos d’un âne. Ces difficultés entraînent souvent des complications à l’accouchement, des fausses couches ou même la mort.  

MSF intervient dans 10 des 18 États du Soudan et a été témoin des graves conséquences de la guerre sur les femmes et leur santé au Darfour et dans tout le pays.  

Au Darfour Occidental et Central, de nombreuses femmes qui vivent dans des zones éloignées des centres urbains accouchent à la maison, en utilisant des méthodes traditionnelles. Le manque d’installations de soins de santé, la distance à parcourir, l’insécurité sur les routes et le prix du transport font que les femmes ne cherchent souvent à se faire traiter qu’en cas de complications. Or elles mettent ainsi leur vie et celle de leur bébé en grand danger.   

Selon l’Organisation mondiale de la Santé, plus de 70 % des structures de santé dans les zones de conflit telles que le Darfour sont à peine opérationnelles ou complètement fermées. Cette situation laisse des millions de personnes sans accès aux soins essentiels dans l’une des pires crises humanitaires de l’histoire récente.  

« Ma plus grande difficulté est de réussir à nourrir mes enfants. Je travaillais beaucoup quand j’étais enceinte et c’est peut-être pour cela que mon bébé est né faible. L’accès aux soins de santé était également difficile, mais MSF nous a fourni de l’aide. »

Une patiente de la maternité de l’hôpital de Murnei, au Darfour Occidental

« Une mère avait accouché à la maison et son placenta n’avait pas été expulsé », explique Wendemagegn Tefera Benty, conseillère médicale à l’hôpital de Zalingei, au Darfour Central. « Comme elle saignait, ils l’ont amenée d’urgence à l’hôpital. La famille a dû la porter et, après une journée de marche, lorsqu’ils sont arrivés, elle était déjà décédée à cause des saignements. »  

La guerre qui se poursuit au Soudan a de profondes répercussions sur la santé des femmes enceintes et de leurs bébés, notamment en ce qui concerne les accouchements prématurés. Elle a entraîné des pertes d’emploi et perturbé l’accès à la nourriture et à l’eau potable. En conséquence, de nombreuses femmes enceintes dénutries arrivent à l’hôpital. Cela affecte directement la santé de leurs bébés, causant souvent des naissances prématurées et la malnutrition. Après leur naissance, ces bébés sont fréquemment admis dans des unités d’observation pour assurer leur survie et leur bien-être. 

Fatna Abdullah est hospitalisée à l’unité de soins intensifs de l’hôpital de Murnei avec son bébé d’un mois, qui a été admis pour de la toux et reçoit des médicaments et de l’oxygène. Soudan, 2025. © Belen Filgueira/MSF

« Ma plus grande difficulté est de réussir à nourrir mes enfants », déclare une patiente de la maternité de l’hôpital de Murnei, au Darfour Occidental. « Je travaillais beaucoup quand j’étais enceinte et c’est peut-être pour cela que mon bébé est né faible. L’accès aux soins de santé était également difficile, mais MSF nous a fourni de l’aide. » 

L’hôpital de Zalingei, soutenu par MSF, est le seul hôpital de référence disponible pour les activités de soins de santé secondaires pour environ 500 000 personnes. Il n’y a pas d’autre installation de santé qui gère les accouchements dans la région. Dans la salle d’opération de Zalingei, les équipes de MSF effectuent plus de 40 césariennes d’urgence par mois. 

« La plupart des structures de santé au Darfour ne sont plus que des bâtiments vides. Il n’y a pas de personnel, pas de médicaments, rien du tout. »  

Osanatu Sento Bangura, une responsable de l’activité des sages-femmes de MSF

Afaf Omar Yahya, 35 ans, a ressenti de fortes douleurs abdominales chez elle, alors que sa grossesse arrivait à terme. En raison du manque de moyens de transport au Darfour, elle n’a eu d’autre choix que de voyager pendant des heures sur un âne pour se rendre à l’hôpital de Zalingei. À son arrivée, le personnel médical l’a informée qu’elle avait fait une fausse couche et qu’elle devait subir une césarienne d’urgence. « Perdre le bébé a été mon plus grand chagrin », a déclaré Afaf alors qu’elle se rétablissait dans l’unité de maternité.  

Les femmes de tout le Darfour partagent des expériences similaires, mais la situation ne montre aucun signe d’amélioration. « La plupart des complications que nous recevons sont causées par l’accouchement à domicile et l’anémie pendant la grossesse », a expliqué Virginie Mukamiza, responsable de l’activité des sages-femmes à l’hôpital de Zalingei. 

Sameera Abkir est examinée par des médecins de MSF à la clinique mobile de Romalia, au Darfour Occidental. Soudan, 2025. © Belen Filgueira/MSF
Sameera Abkir est examinée par des médecins de MSF à la clinique mobile de Romalia, au Darfour Occidental. Soudan, 2025. © Belen Filgueira/MSF

Les femmes enceintes ont recours aux soins médicaux lorsqu’elles souffrent de saignements post-partum ou de septicémie. « La plupart des structures de santé au Darfour ne sont plus que des bâtiments vides », déclare Osanatu Sento Bangura, une responsable de l’activité des sages-femmes de MSF qui travaille à l’hôpital de Murnei, au Darfour Occidental, soutenu par MSF. « Il n’y a pas de personnel, pas de médicaments, rien du tout. Avant la guerre, les gens avaient au moins accès à des centres de soins de santé primaires près de chez eux. Maintenant, ils doivent compter sur de grands hôpitaux qui sont loin. » Beaucoup de ces situations pourraient être évitées grâce à des consultations prénatales et à des systèmes d’orientation adéquats à partir des installations de soins primaires. Cependant, la plupart d’entre elles sont soit hors service depuis le début de la guerre, soit dépendent de l’assistance humanitaire, largement indisponible, pour fournir des services.  

Douze jours après avoir accouché à la maison, Sameera s’est rendue à la clinique mobile de Romalia, dans une région rurale du Darfour Occidental, pour se faire examiner avec son bébé. À son arrivée, elle avait une forte fièvre et des blessures infectées au bras. Après l’accouchement à domicile, elle avait ressenti de terribles douleurs abdominales. Son frère lui avait fait une injection pour faire baisser sa température, mais il l’avait blessée au bras. Elle souffrait et ne pouvait pas tenir son bébé correctement. Après avoir effectué plusieurs tests, les équipes de MSF à la clinique ont découvert l’infection de son bras. Ils ont rapidement désinfecté et soigné la plaie, puis prescrit un traitement.  

Les effets profonds de la guerre menacent de piéger les femmes et les filles dans un cycle sans fin de malnutrition, de déclin de la santé et de mortalité maternelle.  

MSF réitère son appel à une augmentation radicale de l’assistance humanitaire essentielle et de l’accès aux soins de santé au Darfour. Les parties belligérantes doivent garantir un accès sans entrave à l’assistance et lever les obstacles qui empêchent les communautés d’accéder aux soins de santé. L’engagement total des donateurs et donatrices doit être assuré, afin d’accroître un financement durable pour stimuler la réponse humanitaire.