Judite* speaks with a midwife at Chingussura health center in Beira, Mozambique, where MSF supports Ministry of Health staff providing safe abortion care and maternity services. The abortion care she received two weeks before went smoothly, she said. "I had the abortion, it went well, no problems, and I was well taken care of." *Name has been changed
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L’avortement fait partie intégrante des services de santé : cinq raisons le démontrent

Avoir accès à des services d’avortement médicalisé a un réel impact sur la vie et la santé des femmes. Cela leur permet d’éviter le recours à des pratiques dangereuses, de se protéger des complications qui en découlent et de conserver leur autonomie physique.

À Médecins Sans Frontières (MSF), nous considérons que l’avortement médicalisé constitue un service essentiel favorisant le bien-être des personnes que nous soutenons. Il fait partie intégrante de nos services de santé sexuelle et reproductive.  

Nos équipes travaillent dans plusieurs pays à travers le monde où les lois et les points de vue culturels sur l’avortement diffèrent. Chaque jour, le personnel de MSF est témoin de l’impact réel qu’ont les services d’avortement médicalisé sur la vie et la santé des gens. Toute personne souhaitant avoir recours à un avortement, quelle qu’en soit la raison, mérite de recevoir des soins de qualité qui respectent sa dignité. Lorsque les femmes peuvent avoir accès à des soins d’avortement médicalisé près de chez elles, les risques de complications liées à des pratiques dangereuses diminuent de manière significative. Certains avortements peuvent constituer une exigence médicale pour préserver la santé et le bien-être d’une personne, voire une question de vie ou de mort. En tant que prestataire de services de santé, MSF s’engage à respecter l’éthique médicale et à prodiguer des soins centrés sur la personne, ce qui comprend de fournir des avortements sécuritaires.

1. L’avortement est une procédure médicale courante à l’échelle mondiale 

Plus de la moitié des grossesses non désirées dans le monde se terminent par un avortement. Il peut s’agir d’un avortement spontané (fausse couche) ou d’une intervention délibérée. À travers le monde, des femmes ont recours à l’avortement lorsqu’elles ne souhaitent pas être enceintes. Il est fort probable qu’une personne de votre entourage ait déjà eu recours à un avortement.  

Aperçu  

Faits et chiffres sur l’avortement  

  • 73 millions d’avortements ont lieu chaque année dans le monde. 
  • 45 % des avortements sont pratiqués dans des conditions dangereuses, la grande majorité dans des pays à revenu faible ou intermédiaire. 
  • Avorter est une pratique courante : six grossesses non désirées sur 10 et 3 grossesses sur 10 se terminent par un avortement provoqué. 
  • En 2023, MSF a fourni 54 500 consultations pour des avortements médicalisés à travers le monde. 
  • Les restrictions politiques, les inégalités en matière de santé, la stigmatisation et les idées fausses peuvent entraver l’accès à un avortement sécuritaire. 
  • À l’échelle mondiale, les avortements à risque constituent l’une des principales causes de mortalité maternelle. Chaque année, on estime que ceux-ci sont responsables de 22 800 à 31 000 décès

Avortement médicalisé 

Un avortement est considéré comme étant sécuritaire quand la personne pratiquant l’avortement ou soutenant cette procédure a les compétences nécessaires pour le faire. Il doit aussi être réalisé selon une méthode fondée sur des données probantes et adaptée à la durée de la grossesse. Dans le cadre de ses activités médicales, MSF fournit des services d’avortement conformes à ces critères. En général, le personnel de MSF a recours à l’avortement médicamenteux ou à l’aspiration manuelle intra-utérine (AMIU). Ces méthodes sont extrêmement sûres et efficaces pour mettre fin à une grossesse. À cet égard, la procédure d’avortement est plus sûre que de nombreuses interventions médicales courantes, y compris une injection de pénicilline et une extraction dentaire. 

MSF assure aussi un soutien pour les avortements autogérés. Ces avortements médicamenteux peuvent être réalisés hors d’un établissement de santé. L’avortement autogéré est tout aussi sûr et efficace que l’avortement en établissement médical. Dans ce cas, la femme doit avoir accès à des informations précises, à des médicaments de qualité et à un soutien respectueux tout au long du processus, si elle le souhaite. Il permet également aux femmes marginalisées et sous-représentées, ainsi qu’à celles qui vivent loin des structures de santé d’avoir accès plus facilement à des services d’avortement sécuritaire. Les soins autoadministrés, comme l’avortement autogéré, favorisent l’autonomie physique des femmes et leur permettent de décider elles-mêmes des soins dont elles souhaitent bénéficier. 

Pour en savoir plus sur les méthodes utilisées par MSF pour réaliser des avortements médicalisés, référez-vous à nos guides médicaux : https://medicalguidelines.msf.org/fr

L’avortement médicamenteux est efficace à plus de 95 % et extrêmement sûr, avec moins de 1 % de risque de complications graves. Mozambique, 2023. © Miora Rajaonary

2. Les avortements médicalisés sont d’une importance capitale 

Les femmes vivant une grossesse dans un contexte de crise courent plus de risques d’avoir des complications médicales. Dans certains cas, un avortement est requis pour préserver la santé ou la vie d’une personne.  

Lorsque les femmes sont privées d’accès à des services d’avortement médicalisé, elles risquent davantage d’avoir recours à des méthodes dangereuses pouvant entraîner des complications graves, voire mortelles. À l’échelle mondiale, les avortements à risque constituent l’une des principales causes de mortalité maternelle. Chaque année, on estime que ceux-ci sont responsables de 22 800 à 31 000 décès.  

Qu’est-ce qu’un avortement à risque? 

Selon l’Organisation mondiale de la Santé, un avortement est dit à risque quand la personne pratiquant l’avortement ne possède pas les compétences nécessaires ou si l’avortement a lieu dans un environnement qui ne répond pas aux normes médicales minimales.  

Conséquences médicales d’un avortement à risque 

Fournir des services d’avortement médicalisé ne demande que peu de ressources. Lorsque ces services sont légaux et accessibles, les complications sont rares et ne requièrent pas de traitements complexes.  

Toutefois, les complications liées à un avortement pratiqué dans de mauvaises conditions nécessitent des soins d’urgence afin d’éviter des séquelles à long terme, voire un risque mortel. Pourtant, les équipes de MSF soignent régulièrement des femmes souffrant de pathologies et de lésions graves et potentiellement mortelles liées à des avortements non médicalisés. Il peut s’agir d’hémorragies graves, de septicémie (infection générale grave), d’infections, de perforation utérine ou de lésions d’autres organes internes. Certaines personnes meurent avant d’arriver à l’hôpital, d’autres doivent subir une lourde intervention chirurgicale engageant leur pronostic vital et d’autres encore restent handicapées à vie.  

3. Les obstacles juridiques et politiques à l’avortement ont des effets négatifs sur la santé et le bien-être des personnes  

Les lois et les politiques qui restreignent ou interdisent l’accès à l’avortement médicalisé n’empêchent pas les gens de chercher à avoir recours à l’avortement. Celles-ci ne suppriment pas non plus la demande en soins ni ne protègent les femmes des complications découlant d’un avortement non médicalisé. 

Les restrictions juridiques et politiques sur l’avortement affectent la santé des femmes 

Là où des lois ou des mesures politiques restreignent l’avortement, les femmes ayant une grossesse non désirée n’ont parfois d’autre choix que de recourir à des méthodes dangereuses. Dans les endroits où l’avortement est criminalisé, les femmes présentant des complications sont moins susceptibles de solliciter une attention médicale par crainte de poursuites judiciaires. En un an, MSF a soigné plus de 2 800 femmes ayant eu recours à un avortement non médicalisé en République démocratique du Congo (RDC). Une étude menée par MSF au sein de ses centres de santé en RDC a révélé que les femmes et les jeunes filles souffrant de complications liées à un avortement avaient tardé à obtenir des soins par crainte de répercussions juridiques et sociétales. 

Les prestataires et le personnel de santé constatent aussi d’autres répercussions néfastes de la criminalisation de l’avortement : elle peut également entraver la prestation de services de santé sexuelle et reproductive de manière plus générale. MSF et ses partenaires ont mené une étude sur la morbidité et la mortalité liées à un avortement non médicalisé au Nigéria. Celle-ci a montré que les prestataires travaillant dans des endroits restreignant l’accès à des services d’avortement médicalisé pouvaient également faire preuve de réticence à fournir d’autres services de santé sexuelle et reproductive. Parmi les prestataires interrogés au Nigéria, 79 % ont dit qu’ils demanderaient le consentement du conjoint avant de prescrire une contraception. De même, 60 % des prestataires ont dit qu’ils demanderaient le consentement des parents avant de prescrire un moyen de contraception à une personne mineure. Lorsqu’on leur pose la même question sur les soins après avortement, 92 % ont dit qu’ils demanderaient le consentement du conjoint et 88 % qu’ils demanderaient le consentement des parents si la patiente était mineure.  

La nécessité pour les prestataires de soins d’évaluer les risques juridiques et pénaux peut retarder la prestation de soins et nuire à la santé de la patiente, en particulier dans une situation d’urgence. Les lois et politiques qui restreignent l’avortement aggravent les inégalités en matière de santé en entravant l’accès à des services d’avortement médicalisé. Ceci affecte les personnes marginalisées et sous-représentées de manière disproportionnée. 

Les lois et politiques qui restreignent l’avortement aggravent les inégalités en matière de santé en entravant l’accès à des services d’avortement médicalisé. Ceci affecte les personnes marginalisées et sous-représentées de manière disproportionnée.  

Bien que dépénaliser et éliminer les restrictions légales et politiques à l’avortement soit crucial, ces mesures ne permettent pas à elles seules de favoriser la mise à place de services d’avortement médicalisé. C’est notamment le cas là où l’avortement était auparavant interdit par la loi ou fortement restreint. Les systèmes de santé mettent généralement du temps à appliquer des changements et le font de manière peu uniforme. De même, les lacunes qui persistent en matière de connaissances et la résistance du personnel de santé peuvent contribuer à entraver l’accès à ces services d’avortement. Par ailleurs, il arrive que les femmes ne soient pas informées de la possibilité d’avoir recours à un avortement médicalisé ou ne sachent pas comment l’obtenir. En Colombie, par exemple, malgré les mesures importantes de décriminalisation de l’avortement mises en place au cours de la dernière décennie, les équipes de MSF travaillant dans les villes portuaires de Buenaventura et Tumaco ont constaté un manque généralisé de connaissances sur les services d’avortement médicalisé, y compris au sein du personnel de la santé. 

L’avortement médicalisé devrait être légal et réglementé, tout comme n’importe quelle autre procédure médicale afin que quiconque puisse avoir accès à des services de santé essentiels.

4. L’avortement fait partie des services essentiels de santé sexuelle et reproductive 

Les services d’avortement médicalisé sont essentiels et font partie intégrante des services de santé sexuelle et reproductive. Ils permettent de fournir des soins en toute sécurité aux femmes ne souhaitant pas être enceintes. Là où MSF travaille, fournir des services d’avortement médicalisé est un moyen efficace de prévenir la mortalité maternelle ainsi que des souffrances inutiles. 

Les services de santé sexuelle et reproductive de MSF 

Fournir des services de santé sexuelle et reproductive, y compris des avortements médicalisés et des soins après avortement, fait partie de nos activités médicales depuis longtemps. En 2023, les équipes de MSF ont assuré 54 500 consultations pour des avortements médicalisés à travers le monde, la majorité en Afrique. L’organisation a également fourni 31 000 consultations pour des soins après avortement, la plupart en Afghanistan, au Yémen, au Soudan du Sud et au Bangladesh. 

En plus de ces services, MSF propose des consultations pour la contraception et fournit diverses méthodes contraceptives. Ces méthodes permettent de prévenir des grossesses non désirées ou la contamination par des infections sexuellement transmissibles. MSF s’efforce de fournir un large éventail de contraceptifs, comme l’implant, le dispositif intra-utérin, les produits injectables, la pilule contraceptive orale, le préservatif et la contraception d’urgence.  

Même les personnes ayant accès à une contraception peuvent être confrontées à une grossesse non désirée et avoir besoin d’un avortement médicalisé. 

Avoir accès à des conseils de qualité, à des renseignements adéquats et à diverses méthodes de contraception peut avoir un impact positif et non négligeable sur le plan individuel, familial et collectif. Dans le même temps, améliorer l’accès à la contraception doit toujours s’accompagner du respect de l’autonomie d’une personne dans ce domaine. Il est important que celle-ci soit soutenue dans sa décision d’utiliser ou non un moyen de contraception, dans les méthodes qu’elle choisit d’utiliser ou non, ainsi que le moment où elle choisit de les utiliser ou pas. Nous devons donc encourager le libre arbitre de chaque personne en matière de contraception et les soutenir en ce sens. 

À cet égard, la contraception ne substitue pas aux services d’avortement médicalisé. Même les personnes ayant accès à une contraception peuvent être confrontées à une grossesse non désirée et avoir besoin d’un avortement médicalisé. Dans le cadre de son engagement à respecter l’éthique médicale et à fournir des soins centrés sur la personne, MSF propose une gamme de services de santé sexuelle et reproductive aux personnes sollicitant son assistance.

5. L’avortement est une question d’autonomie physique 

Selon MSF, il n’appartient pas aux prestataires de soins de santé de remettre en cause les raisons qui poussent une personne à solliciter un avortement.  

Nous respectons sa décision et lui fournissons des renseignements précis et complets pour prendre une décision éclairée qui concerne son corps. Quelles que soient les décisions de chaque personne, il nous incombe de lui fournir des soins fiables et de qualité. 

Nous savons que le manque d’accès à un avortement médicalisé a souvent des conséquences graves et néfastes pour la vie d’une personne. Montrer que l’avortement médicalisé fait partie intégrante des services de santé est un moyen efficace de prévenir les problèmes de santé et d’améliorer la vie des gens. Toute personne souhaitant avoir recours à un avortement, quelle qu’en soit la raison, mérite de recevoir des soins de qualité qui respectent sa dignité.