Geo Barents : le navire de sauvetage de MSF est bloqué par l’Italie pour une durée de 60 jours
Le 26 août 2024, les autorités italiennes ont donné un ordre de détention de 60 jours à l’encontre du Geo Barents – un navire de recherche et de sauvetage opéré par Médecins Sans Frontières (MSF) – pour des violations présumées des règles de sécurité maritime.
L’ordre d’immobilisation a été donné à la suite de plusieurs opérations de sauvetage qui ont eu lieu très tôt le matin du 23 août en Méditerranée centrale. Au cours de ces opérations, le Geo Barents n’aurait pas fourni d’informations en temps voulu au Centre de coordination des secours maritimes italien (MRCC) et aurait mis en danger des vies humaines. MSF réfute ces allégations, basées sur des informations provenant des gardes-côtes libyens.
« Les Nations Unies (ONU) ont porté plusieurs accusations contre la Garde côtière libyenne, qui est soutenue par l’Union européenne et que les autorités italiennes considèrent comme un acteur fiable. Ils l’ont accusée de complicité dans de graves violations des droits de la personne en Libye, assimilables à des crimes contre l’humanité, de collusion avec des passeurs et des trafiquants, et d’être responsable de violents refoulements en mer », affirme Juan Matias Gil, représentant de MSF pour les opérations de recherche et de sauvetage. « Nous avons été sanctionnés pour avoir simplement rempli notre devoir légal de porter secours. »
Le 23 août, les équipes de MSF sur le Geo Barents ont mené cinq opérations de sauvetage. La troisième opération, pour laquelle MSF est accusée de ne pas avoir fourni d’informations en temps voulu, a eu lieu après que notre équipe a constaté qu’un nombre important de personnes étaient passées par-dessus bord à proximité du navire. « C’était au milieu de la nuit; nous avons vu des gens sauter d’un bateau en fibre de verre, tomber ou être poussés dans l’eau. Nos équipes n’avaient pas d’autre choix que d’aller les chercher et de les sortir de l’eau le plus rapidement possible », explique Riccardo Gatti, chef de l’équipe de recherche et de sauvetage de MSF. « Il y avait un risque imminent que les gens se noient ou se perdent dans l’obscurité. »
Cet incident est important non seulement parce que c’est la troisième fois que le Geo Barents est immobilisé, mais aussi parce qu’il s’agit de la plus longue période de détention. Jusqu’à présent, c’est la 23e fois qu’un navire de sauvetage humanitaire est détenu depuis l’entrée en vigueur du décret-loi italien au début de 2023, connu sous le nom de « décret Piantedosi ». Ce décret-loi est spécifiquement conçu pour entraver les activités essentielles de recherche et de sauvetage des organisations non gouvernementales (ONG) en mer.
« C’est un nouvel exemple qui montre à quel point le décret Piantedosi est non seulement contraire aux lois internationales et européennes, mais aussi en contradiction avec les obligations d’agir face à un état de nécessité lorsque des vies sont en danger », déclare Juan Matias Gil. « Les autorités nous forcent à donner la priorité soit au sauvetage de personnes en mer, soit à la liberté du navire de sauvetage. La préservation de la vie humaine est au cœur de la mission sociale de MSF, et nous allons donc contester cette détention illégale par les voies légales appropriées. »
Le Geo Barents n’est actuellement pas en mesure d’effectuer des sauvetages en Méditerranée en raison de cette détention. La situation ne fera qu’aggraver la capacité déjà insuffisante de recherche et de sauvetage en mer, rendant la Méditerranée centrale – l’une des routes migratoires les plus dangereuses au monde – encore plus meurtrière.
MSF exhorte les autorités italiennes à libérer le Geo Barents de cette détention, afin que ce navire puisse remplir son devoir de sauvetage et à cesser immédiatement d’entraver l’aide humanitaire au sauvetage en mer. Nous demandons également à l’Union européenne et à ses États membres de suspendre tout soutien matériel et financier aux gardes-côtes libyens et aux autorités ayant des antécédents de violations des droits de la personne.