Une équipe de MSF à l’entrée de la base de MSF à Goma, peu avant le départ du premier convoi d’aide médicale pour Sake. République démocratique du Congo, 2025 © Jospin Mwisha
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RDC : MSF adapte son intervention d’urgence face aux départs massifs hors des camps de personnes déplacées autour de Goma

MSF envoie des cliniques mobiles, alors que les gens recommencent à se déplacer.

À la suite des combats et aux ordres d’évacuation émis par le groupe Mouvement du 23 Mars/Alliance Fleuve Congo (M23/AFC), des centaines de milliers de gens ont quitté les camps de personnes déplacées autour de Goma, en République démocratique du Congo (RDC). Face à cette situation, Médecins Sans Frontières (MSF) a adapté son approche. Elle a pour cela envoyé des équipes mobiles afin d’appuyer les communautés poussées une nouvelle fois sur les routes, dans la plus grande incertitude et dans des conditions périlleuses. 

Goma, la capitale de la province du Nord-Kivu, a considérablement changé en quelques semaines. Avant que le M23/AFC ne s’en empare fin janvier, la ville comptait encore – en plus de ses deux millions d’habitantes et habitants – quelque 650 000 personnes déplacées. Celles-ci vivaient pour la plupart dans des sites de fortune situés dans sa périphérie. 

« Et partout, notre constat a été le même : les structures de soins qui étaient déjà défaillantes avant la crise ont été abandonnées, détruites ou, encore pires, pillées. »

Anthony Kergosien, responsable des activités mobiles de MSF autour de Goma

Plusieurs camps ont commencé à se vider lorsque les combats se sont intensifiés à la fin janvier. La quasi-totalité d’entre eux a été abandonnée après que les nouvelles autorités de facto ont ordonné aux gens de rentrer dans leurs localités d’origine.  

Bien qu’une partie des personnes déplacées ait décidé de rester près de Goma, la plupart ont pris la direction des territoires environnants, vers le nord ou l’ouest, sans savoir ce qui les attendait sur place. En quelques jours, d’interminables colonnes d’hommes, de femmes et d’enfants sont apparues sur les routes, transportant le peu qu’elles pouvaient à pied, en moto-taxi ou en minibus partagés. Des gens nous ont dit avoir marché des jours durant, sans eau ni nourriture. 

Les équipes de cliniques mobiles de MSF apportent un soutien aux personnes déplacées des camps de Goma qui sont retournées dans leurs villages d’origine. République démocratique du Congo, 2025. © Daniel Buuma

« Compte tenu de ces mouvements massifs, nous avons envoyé des équipes sur les routes du retour pour évaluer les structures sanitaires qui allaient devoir gérer des flux soudains de patientes et patients », explique Anthony Kergosien, responsable des activités mobiles de MSF autour de Goma.  

« Et partout, notre constat a été le même : les structures de soins qui étaient déjà défaillantes avant la crise ont été abandonnées, détruites ou, encore pires, pillées. Mais elles doivent maintenant accueillir un grand nombre de gens, et faire face à un risque de propagation de maladies à potentiel épidémiques comme le choléra, la mpox ou la rougeole qui étaient déjà présentes dans les camps. » 

Sur la base d’évaluations menées dès les premiers jours, les équipes de MSF ont commencé à fournir des équipements, des médicaments et du personnel à davantage de centres de santé situés dans les territoires de Nyiragongo et Masisi. Nos collègues ont aussi mis sur place des cliniques mobiles dans les zones plus difficiles d’accès pour offrir des soins gratuits aux personnes qui reviennent chez elles ou qui sont de passage. 

L’urgence d’améliorer les conditions du retour 

Le centre de santé de référence de Sake, petite ville située à 25 kilomètres à l’ouest de Goma, fait partie des structures appuyées par MSF dans le cadre de ces interventions d’urgence. 

Du fait de sa localisation stratégique au carrefour des routes partant vers Masisi centre, Kitchanga et Minova, Sake a été le théâtre d’importants combats au cours des dernières années. 

« Les personnes résidant à Sake reviennent, et la ville est un passage obligé pour les familles qui retournent vers le Masisi ou le Sud-Kivu », explique Anthony Kergosien. « Nous avons donc décidé de remettre en fonction d’urgence le centre de santé de référence, fort abîmé par les récents combats. Nous avons aussi réaménagé l’unité de traitement du choléra, qui reçoit actuellement une vingtaine de malades par jour. Près de 200 consultations se déroulent quotidiennement au centre, surtout pour des pathologies courantes comme des infections respiratoires ou des diarrhées. Mais nous avons de plus des cas de mpox et des patientes qui viennent consulter à la suite de violences sexuelles. » 

Un membre du personnel de MSF parle à une patiente lors d’une clinique mobile à Kingi, dans le territoire de Masisi. République démocratique du Congo, 2025. © Daniel Buuma

« Il existe un besoin urgent d’améliorer les conditions de vie dans les localités de retour et d’y renforcer l’aide humanitaire. Malheureusement, rares sont les organisations présentes aujourd’hui dans ces régions. »

Anthony Kergosien, responsable des activités mobiles de MSF autour de Goma

À partir de Sake, MSF a également lancé des équipes médicales mobiles et a apporté son soutien à d’autres structures médicales localisées plus loin sur les routes montagneuses. L’accès à des soins gratuits sera essentiel pour des communautés qui reviennent des camps dans une situation de vulnérabilité extrême, souvent sans argent, sans avoir pu cultiver et parfois sans même les outils nécessaires pour le faire. 

« Je suis rentré à Kabati il y a une semaine. C’est tranquille, mais on a vraiment faim », témoigne Bigirimana, un père de famille resté deux ans dans le camp de Bulengo et de retour chez lui. « Nous avons aussi besoin de médicaments, car la plupart d’entre nous sont malades. Il y a beaucoup de cas de diarrhée, surtout chez les enfants. » 

« Les risques liés à l’insécurité alimentaire sont réels », confirme Anthony Kergosien. « Nous avons d’ailleurs relancé plusieurs unités de nutrition thérapeutiques. Viennent s’y ajouter les risques de propagation des épidémies qui se concentraient autour de Goma. Il existe un besoin urgent d’améliorer les conditions de vie dans les localités de retour et d’y renforcer l’aide humanitaire. Malheureusement, rares sont les organisations présentes aujourd’hui dans ces régions. » 

Au 26 février, les équipes mobiles de MSF soutenaient des structures de soins éloignées de Goma à Buhumba, Kilolirwe, Sake, Kingi, Luhonga et Makombo. Outre ces activités, MSF continue d’aider de nombreuses structures de soins à travers le Nord-Kivu. L’organisation poursuit aussi à Goma son appui à la prise en charge des personnes blessées dans les hôpitaux de Kyeshero et Virunga. Elle soutient en outre plusieurs structures de soins de la ville dans la fourniture de soins de santé primaires, le traitement de la malnutrition et du choléra, ainsi que la prise en charge des victimes de violences sexuelles.